Que je vous explique. Dès que t'as un casier judiciaire, tu deviens immédiatement un connard. Un putain de trafiquant, de tueur, de violeur ou de drogué. Ou tout ça à la fois, et pas forcément dans le même ordre. Si tu plaides non coupable, t'es qu'un branleur, un putain de lâche. Un petit minable des bas fonds. Surtout si tu viens du Bronx. Bref, j'avais rien pour moi. J'ai beau avoir tenté de faire ce que ma mère me disait, soit : « Mon fils, ne fais pas comme ton père. Ne deviens pas un minable, trouve-toi une belle nana, fais-lui des gosses et trouve toi un boulot qui te rapportera assez pour survivre. » J'ai pas pu me résoudre. Trop compliqué. Déjà, parce que je suis ce genre de connard qui se tire sans plus jamais donner de nouvelles, au petit matin, après avoir tiré mon coup. Ensuite, parce que j'avais une passion. Ouais, une passion. Vous savez, ce truc à la con qui prend aux tripes, vous donnes un but dans la vie et barre définitivement le mot : RAISON, de votre cervelle ? Et bien, voilà. J'étais un trou du cul du Bronx, sans un sou, sans nana et avec une gratte qu'avait cramée toutes mes économies. Forcément, pour me la payer, il a fallu que je ruse un peu. J'ai bien tenté les petits jobs chez le disquaire, mais j'ai fini pas lui coller mon point dans la gueule. Allez savoir pourquoi, j'ai pas dû aimer qu'il me foute sa main au cul. Ouais, vous avez bien compris. Non, je suis pas homophobe, j'aime juste pas qu'un mec me pelote.

Ma mère dit que c'est parce que je suis un connard de Misogyne, que j'ai une tolérance proche de zéro pour ce genre d'approche musclée. Je ne suis pas d'accord. Mais on s'en fout. Bref, j'ai bien tenté de trouver d'autres boulots, chez le disquaire, c'était le pied. J'étais dans mon élément et, je m'y connaissais sacrément bien. J'ai testé de tout. Vendeur, plombier ... Même éboueur. Même topo, rien à faire. Ma foutue passion m'empêchait d'être attentif à ce que je faisais, ce qui se résumait par : « On rappellera, au revoir. » Ce que je traduisais par : « Va te faire voir ailleurs, si j'y suis. » Puis un jour, je suis tombé sur une boutique I-FI-Vidéo. Ouais, dans le quartier, y en avait encore une qui survivait. Malgré toutes les grosses boites des grandes villes qui commençaient à fleurir. J'étais bien content, parce que le mec m'a jugé un bon moment, avant de me proposer le Job. De lui-même, comme ça ! J'ai trouvé ça louche, mais j'étais fauché. Alors, j'ai dit oui.

J'ai regretté.

Ce type, Max, ne vendait pas de chaînes I-Fi. Je l'ai compris trop tard, une fois que les flics sont arrivés en force, en défonçant la porte, énumérant nos droits et enfonçant le métal mordant des menottes dans nos chairs. J'ai regretté de ne pas avoir de supers pouvoirs, comme Magneto, tiens. Cette boite grouillait de métal, partout. L'odeur chaude des pellicules de cassettes usées, ça, on connaissait. Enfin, personnellement, j'étais sincèrement persuadé que les colis que je préparais, c'était de la boite de ferraille destinée à lobotomiser le cerveaux de gosses et des bons gros Américain, scotchés vingt-quatre heures sur vingt-quatre devant leurs écrans géants. En apparence, c'était bien le cas. Je ne me chargeais jamais de la vente, j'ai pas eu le temps. Max disait qu'il allait m'apprendre, et me demandait juste d'observer, quand j'avais deux minutes. Mais en général, il préférait me faire soulever les gros cartons pour les amener dans le camion. Comprenez, j'étais un malabar à côté de lui. Où j'en suis ? Ah oui, les poulets qui débarquent en trombe, nous crachant leurs venins tout en nous ordonnant de nous agenouiller. Déjà, là, j'ai senti qu'un truc clochait. J'étais neutre, aucune expression lisible sur mon faciès. Mais pas Max, il était blanc comme un linge, pire encore quand il a vu mon petit regard noir, en coin. Alors que j'étais à genoux, mains derrière la tête. Parce que, je venais de voir les chiens.

Et un chien flic, ça ne peut signifier qu'une seule chose : Drogue. J'ai rapidement fait le tour, les cartons qu'il emballait lui-même, ses éternuements fréquents et ce, uniquement en réserve et à à peine en boutique. De la poudre. Ce connard m'avait fait livrer de la coque à mon insu, j'ai payé le prix fort. Les forces de l'ordre refusait de me croire, j'avais beau leur expliquer que j'étais au courant de rien, ces connards m'ont pas accordé un seul crédit. Pour eux, j'avais la tronche d'un gangster et, j'étais plus apte à diriger toutes les opérations. Plutôt que Max. Ce que ce petit traître a "confirmé", disant que j'étais son bourreau. Tout s'est retourné contre moi. Et voilà, Cinq ans derrières les barreaux pour détention de drogue. Ca refroidit ... Et tout est vrai. Les mecs entre eux, les douches. Tout. Heureusement que j'ai une bonne droite et une tête qui fait reculer les plus audacieux, sinon, j'étais cuit.

La taule. La première chose que j'ai remarqué, c'est l'odeur. Pas les murs gris, ni les taches oranges des uniformes des prisonniers, ou encore les regards mauvais des agents qui seraient mes futurs bourreaux. Non. L'odeur, acre. Ca puait le renfermé, le rance et la pisse. Insupportable. Heureusement qu'on finit par s'y habituer. Mais la chose que j'ai tout de suite sentit, en sortant de prison, c'ést l'odeur de l'herbe. Ca aussi, on peut rapidement l'oublier. La première chose que j'ai entreprise, c'est de me glisser dans un parc, de me débarrasser de mon Sweat pour m'étaler dans l'herbe fraîche et encore humide. C'est fou, ce qu'on oublie les bonheurs simple rapidement, quand on veut tout ou rien. Mon premier reflex, ça été de mater les guibolles d'une joggeuse carrément alléchante. Pas étonnant, je venais de me taper cinq ans d'abstinence, moi, un coureur de jupons. Mais, j'en suis pas devenu un détraqué pour autant. J'ai rebroussé chemin, en me disant que tirer un coup, ce serait pour plus tard. La première difficulté, ce serait de trouver un Job. Mon compte intacte, j'étais au moins certains d'avoir encore de quoi survivre. Et j'avais même une sacrée surprise. 3000 dollars, assez pour m'aider à redémarrer. Et qui m'avait fait ce cadeau ? Ma folle de mère. J'avais 30 ans, et ça ne me faisait pas sentir comme un vieux garçon mais, comme un béni des dieux. J'avais pas eu de chance, pas du tout. Mais je le sentais bien, cette fois. Peut-être que les choses s'arrangeraient. Ouais, j'y croyais vraiment. Après tout, j'étais pas mauvais comme gars. La seule chose que la prison m'a laissée, c'est un goût amer et une addiction à la nicotine. Et des muscles, parce qu'on se fait vite chier entre quatre murs. Bon ok, et une facilité à coller des droites plus aiguë encore qu'avant. Je suis partie, avec ma caisse, mon perfecto et ma gratte, ainsi qu'un paquet de clopes neuves. J'ai commencé en créchant dans des motels pourris, mais les trucs méprisables, j'avais déjà l'habitude. C'était pas cher, et je devais faire gaffe, si je voulais pas gaspiller l'argent de ma mère. Oui, l'argent de ma mère. Hors de question de le prendre pour acquis, car j'allai la rembourser. J'ai cherché, et j'ai finis par trouver un boulot de livreur. Un truc clean, cette fois, c'était sûr et pas dans le Bronx. Trois mois plus tard, j'ai trouvé cet immeuble, l'appartement était un peu petit, mais propre et idéal. C'était il y a un an. Depuis, j'ai de nouveaux des démons. Une voisine, et des envies de meurtres.