Le vilain petit canard, le mouton noir, déjà tout petit la famille c’était pas ça, tu supportais pas la présence de tes parents dans ton petit cercle privé et encore moins celle de ton deuxième grand frère. La seule personne qui te comprenait, c’était l’ainé de tous les ainés, il était passé par là lui aussi, la rebellions, lui aussi voulait voler de ses propres ailes pour toucher la liberté du bout des doigts, mais toi t’en voulais plus, tu ne voulais pas seulement la frôler, tu souhaitais la posséder. Peut-être est-ce pour cette raison qu’à peine le stade de l’adolescence atteint tu vadrouillais à droite à gauche, cherchant à t’éloigner le plus possible de ce cocon familiale qui t’étouffais un peu plus chaque jour. T’enchainais les clopes, puis t’étais passé à autre chose de plus fort, de moins licite, quelque chose dont l’on n’oserait pas parler dans ta famille parfaite. Tous avaient échappés à cette tentation et toi tu t’étais jeté dans la gueule du loup, pourquoi ? Pour ne pas être comme eux tout simplement. T’aimais passer tes soirées posé dans un appartement qui changeait tous les jours, cigarette en main, bouteilles d’alcool alignées en rang d’oignons sur une table basse avec en fond un peu de musique funky pour mettre l’ambiance et donner un semblant de liberté, s’évader l’espace de quelques heures. Ta famille ne s’inquiétaient pas pour toi pour tout dire ils s’en foutaient éperdument de ta petite personne, mais toi ça te dérangeais pas, bien au contraire, tu te sentais plus puissant, plus indépendant. Tu trainais dans les rues sans te soucier du temps qui passe, tu t’invitais à des soirées sans même connaître un visage, t’étais un électron totalement libre, les ambiances malsaines, ça te connaissait, t’adorais ça, tu te sentais dans ton élément. Lorsque t’avais l’audace de te pointer dans ton foyer, tes parents ne te parlaient pas, t’étais un fantôme à leurs yeux, ton frère Harys, tu t’en fichais, il pouvait te faire la moral tant qu’il voulait, c’était le fils à papa, l’enfant prodige, celui à qui tout réussi alors que toi t’étais un simple drogué, une ombre à ce tableau parfait si bien que tu te demandais si tu n’étais pas adopté. Ta vie n’était que débauche et plaisirs malsains, mais ça te suffisait, t’avais pas envie d’être félicité, tu t’en fichais d’avoir un diplôme ou pas, t’aimais pas les cours et ça se voyait, te croiser dans les couloirs du lycée relevait du miracle, non tu préférais errer dans les rues à la recherche d’une occupation quelconque. Tu te souviens d’un soir en particulier, le déclencheur d’une colère et d’une haine sans précédent, Harys, cet idiot, ce fayot avait tout déballé sur ta vie nocturne, celle que tu menais en cachette, tes petits secrets que tu gardais pour toi. À table, un dîner qui tourna au cauchemar. Tu te souviens de ses paroles, du moindre mot et de l’intonation qu’il avait pris, t’avais lâché tes couverts et planta ton regard dans celui de cet être détestable. Le silence fut rompu par les gémissements de ta pauvre mère qui n’arrivait pas à digérer la nouvelle, son petit garçon était devenu quelqu’un d’horrible, une personne qui allait à l’encontre de la justice et formait cette nouvelle génération de rebelle. Tu t’étais levé, te mordant la lèvre inferieur ne lâchant pas Harys du regard, tu devais pas, t’avais envie de lui coller la plus grosse baffe du monde, non, le tuer, prendre un couteau et l’enfoncer dans sa peau parfaite. Ton père t’avais attrapé par ta veste, te levant bien au-dessus du sol avant de te coller à un mur pour te déballer des paroles qui faisaient mal à entendre, mais t’encaissais, il te faisait peur, pour la première fois de ta vie tu te laissais faire. Il te frappait, te jetais à terre avant d’enfoncer ses pieds dans tes côtés pour te donner une leçon que t’allait pas oublier mais qui ne servait à rien. Et tu détestais le fayot, tu ne pouvais pas le regarder, trop occuper à fermer les yeux, à serrer les dents pour ne pas ressentir la douleur des coups mais son visage de fils prodige te hantait, t’étais une loque humaine battu à mort dans ta propre cuisine. Ton petit monde s’écroulait, ta vie idyllique se transformait petit à petit en un enfer sans nom alors que tu te sentais partir, tu ne pouvais plus lutter alors que ton paternel s’acharnait sur ton corps frêle, t’entendais les sanglots de ta mère devenir de plus en plus lointains pour finalement s’évanouir laissant place au silence. Tu te croyais mort, tu pensais que plus rien ne pouvait t’atteindre, que ton âme s’était tiré loin de cette Terre, tu te demandais si dieu allait te féliciter d’avoir lutté avant de t’offrir une place gratuite pour le paradis, mais non, tu le savais, l’enfer t’ouvrait ses bras mortels et pourtant, tu te réveillais dans ton lit, le corps meurtri, t’arrivais pas à te lever, bouger était un supplice tant la douleur tapait. Depuis combien de temps t’étais enroulé dans tes draps ? Combien de jours s’étaient enchaînés ? Tu passais une main sur ton visage avant de grimacer en essayant de te lever. Le soleil était à son zénith, le chant des oiseaux t’écœurait et t’apaisait en même temps alors que seul le silence régnait dans la grande maison. UC